Black Star, couverture du dernier vynil de David Bowie |
Le temps suspendu me balançait d'une pensée à l'autre. Je savais qu'une fois que le soleil entrerait par la porte et ferait briller les grenouilles, les champignons, les lasagnes et les ficelles, ma jour née de travail arriverait à sa fin. J'entendis la sonnette de la porte comme un coucou qui annonçait une rencontre insolite.
C'était un touriste, un vrai, avec ses bermudas, chose rare dans le quartier. Mais d'où venait-il ? En s'approchant, je fus surprise de voir qu'il avait les yeux de différentes couleurs. Je sus à l'ins tant que j'avais devant moi David Bowie en personne.
Il me demanda une cartouche de Malboro et un briquet. J'aurais pu lui donner le premier sous la main, mais je voulus établir un contact intersidéral...
« A colour one or a black one ? (couleur ou noir ?)
Un air glacial ponctua une se conde d'arrêt. Le voilà à décou vert !
« A black one ! » - répondit « l'homme qui venait d'ailleurs »...
Je ne me rappelle plus comment
je lui rendis la monnaie... Allais-je toucher sa main pour savoir s'il était bien humain ? Allais-je es sayer de communiquer avec une étoile filante, à des années lumière de ma vie anonyme ? Mission impossible ? Pas pour les mystères inconscients du langage...
Bien des années plus tard, peu avant sa mort, Bowie sortait son dernier disque, et lui donnait ce titre : « Black star ». J'eus un petit vertige, car ce titre me rappela notre conversation minimaliste dans mon anglais d'indienne co lonisée. C'est un peu délirant, je sais, mais j'entendis sa voix nous chanter : Nous sommes tous les héros d'un jour...
L'au-delà ce n'était pas loin : juste au coin, dans un kiosque à Bellevaux.